Akasha Board Co, Le skate Made in France


Julien, un grand passionné de skates et de snowboards nous ouvre les portes de son atelier, où il réalise des boards originales et de manière artisanale. 

Interview 


Est-ce que tu peux te présenter ? 

Je m’appelle Julien, j’ai 30 ans, je suis originaire de la région (ndlr: PACA). J’ai fait mes études à Aix, ensuite je suis partie à Gap dans les Hautes-Alpes pour faire une fac de sport. J’ai eu l’appel de la montagne et j'avais aussi l'envie de faire du snowboard en plus du skate. Là-bas, je pouvais faire les 2. J’ai été accompagnateur, puis entraîneur dans un centre de snow et de ski freestyle. Ça m’a conduit à l'organisation de petites compétitions avec un shop local. J’ai aussi été shepherd pendant une saison, ça s’est relativement bien passé, donc j’ai été nommé responsable du snow parc pendant 4 saisons. 
J’ai aussi pu participer à la construction de skateparks, de bowls et de pistes de ski avec un pote qui a une entreprise familiale dans le secteur, comme j’avais un petit peu l’oeil pour les formes si on peut dire.

Quand j’ai rencontré Tony, mon ancien associé, qui était à la base ébéniste, maquettiste et luthier, il était chaud pour faire des skates donc on s’est lancés tous les deux. On a bossé un petit moment ensemble sur l’élaboration du processus de fabrication et l’esprit qu’on voulait développer. Nos chemins ont dû se séparer et j’ai repris les rennes tout seul. J’ai changé le nom et c’est devenu Akasha, depuis cet été.  


Que veut dire Akasha ? 

C’est un ami qui est tatoueur qui m’a proposé ce nom quand j’étais en recherche intensive pour rebondir sur l’autre marque. C’est un peu au croisement entre la tradition et la religion bouddhiste et hindou. Akasha, c'est considéré comme le cinquième élément en fait. Tu as l’eau, l’air, le feu et la terre. Et Akasha, c’est un peu l’espace qu’il y a autour et qui articule les choses, qui fait le lien entre les éléments mais aussi entre la terre, les esprits, les hommes et les dieux.

Pour faire le rapport avec le skate, j’aimais bien cet esprit, un potentiel de connexion qui peut exister tout le temps. C’est une manière de dire que même si tu as un pied sur du bitume, sur ce coté urbain, l'autre pied reste sur le bois et te ramène à un principe de base. On s’aperçoit qu'on a plus souvent un pied dans la nature qu’un pied sur le goudron, quand tu pratiques en tout cas. C’est pour faire cette liaison entre le coté urbain et le coté nature dans le skate parce que ma démarche est un peu écolo. Je préfère dire qu’elle est logique, ça me semble à peu près normal de faire ça. Travailler avec du bois français, des colles à base d’eau et de la peinture à peu près clean, essayer de limiter le voyage des matériaux... Essayer de faire les choses respectueusement en fait. 


Quel est le concept de la marque Akasha ?

Avec mon ancien associé, on avait des shapes ( Ndlr: formes) spécifiques qui nous plaisaient, puis au final on s’est aperçu qu’on avait vraiment des formes de boards par décennie, en quelques sorte. Le concept est de travailler avec toutes ces formes en respectant les matériaux qui étaient utilisés à l’époque. Dans les années 60, les mecs prenaient des planches en bois massifs, c’était pas du contre-plaqué. Ils coupaient ça à la scie sauteuse et faisaient des boards un peu plus propre. Ils ont commencé comme ça !

Tout est fait de manière artisanale. Après, je ne suis pas avec une lime et un cutter dans mon atelier, mais tous les outils sont guidés par la main de l’homme. Il y a des imperfections, aucune planche n’est pareil et elles sont toutes passées entre les mains de l’homme. 

Ce sont des produits uniques ?

Je fais les choses en série. Donc unique, non, mais on va plutôt dire que ce sont des petites séries.

Comment sont réalisés les dessins sur tes skates ? 

J’en ai fait certain, d’autres ont été fait par mon ancien associé à l’époque. Sur les board  street par exemple, tu as 2/3 peints, 1/3 teinté pour un effet avec le vinage du bois. Ça me plaisait bien d’avoir une belle déco, très graphique. J’essaye de mettre en valeur le matériel utilisé. Je suis ouvert au fil des rencontres à bosser sur de nouvelles déco.

Tu proposes aussi aux clients de personnaliser eux-même leur skate ?

Oui, là par contre on peut dire que ce sont des pièces uniques. Comme je maîtrise la production de A à Z, je peux me permettre de proposer aux gens, qu’il viennent avec leur déco ou une shape particulière. Je pars de plis de bois que je commence à encoller et presser jusqu’à la phase finale où je passe le vernis. Toutes ses phases sont faites, ici, dans mon atelier. Si tu as une board qui date des années 90 ou que ton grand frère avait je ne sais pas, je peux essayer de m’en inspirer et de refaire la même chose pour arriver à retrouver la sensation que tu avais dessus.   



Est-ce que tu prévois de faire des collab' ?

Ça me parait un peu compliqué pour l’instant. C’est plus au feeling mais j’y pense. J’ai un ami qui a proposé à des graffeurs de faire des boards graffées, il y en a quelques unes qui sont sorties. Il y des collaborations qui ont été faites aussi avec la boutique de fringues Semis dans le Corbusier. Après, c’est au fil des rencontres. Si les gens sont motivés et qu’on a une démarche similaire où qu’on apprécie la démarche de l'autre, alors pourquoi pas.


Pourquoi le skate ?

J’en fais depuis que je suis au collège. Ça coule de source en quelque sorte. Il y a des moments où j’ai arrêté parce que je me suis fais mal ou parce que ça ma saoulé comme tout le monde. Avec les différentes expériences professionnelles que j’ai eu, je me suis rendu compte que j’avais des mains et que je savais à peu près m’en servir. J’ai essayé de concilier passion et travail manuel, et ça m'a logiquement mené là ou j’en suis.




Comment as-tu financé ton projet ?

Je n'ai pas fais d’emprunt. À l’époque, il y avait mon ancien associé qui était la, on s’est démerdés à deux et maintenant je me démerde tout seul. J’ai aussi eu la chance que ma famille m’aide un peu au début. 

Est-ce que tu as eu des difficultés dans la construction de ton projet ? 

Oui et j’en ai encore. Au début, les difficultés étaient de trouver le bon bois ou la bonne colle, le choix et la fabrication des gabarits, la sérigraphie, etc. Tout ce que j’inclus dans le processus de fabrication, il a fallu faire des recherches et les déterminer pour arriver à des délais moins longs. Au début, ça nous prenait un temps fou, puis on s’est aperçu qu’on pouvait raccourcir les choses et s’améliorer en terme de travail manuel. Après ,il faut les vendre, et ça aussi c'est compliqué.



"Je n’ai rien inventé, je n’apporte pas de technologie particulière. Je ne vais pas dire que mes boards sont mieux que les autres, elles sont différentes."


Il y a le bowl du Prado, le skatepark de la Friche Belle de Mai, as-tu réussi à trouver un public assez important sur Marseille et dans la région ?

Pas encore, je galère un petit peu. Il y a un public, certes. La question est de savoir s'il est sensible à cette démarche. Dans les magasins que j’ai démarché, on me dit que les planches sont belles, qu’elle peuvent plaire au public, que la démarche est intéressante et respectable. Après, je ne sais pas si les gens, et beaucoup les jeunes, sont assez sensibles au Made in France. Certains n'en ont rien à foutre d'avoir un morceau de bois sous les bras s'ils peuvent le payer 30 balles. Je ne suis pas hors de prix mais je ne suis pas dans les prix bas non plus, du coup, les gens qui recherchent du consommable passent à côté de quelque chose. Il y a aussi une image de marque importante dans le monde du skate. J’ai une image d’artisan, à coté tu as toutes les "supers" marques avec les riders connus, donc toute la communication et le contenu qui va avec. Les photos, les vidéos et les posters que tu as dans ta chambre quand tu es gamin. Tu veux la board du skateur parce que tu es influencé. Tout le monde l’a été, je l’ai été aussi.

Après, tout est une question de communication, si ces marques là communiquent sur de grandes stars du skate, tu peux communiquer sur autre chose. 

Oui, je dois communiquer autrement. Après je n’ai pas encore fait beaucoup de photos ou même de vidéos. Il faut un esprit différent des autres, parce que ça ne sert à rien de jouer sur le même topo. J'essaie de tirer mon épingle du jeu en mettant en avant le travail et la démarche.


























Où peut-on se procurer tes boards ?

Sur le site internet principalement. Dans quelques skates shops, chez Kothaï également.  Les boards de skates sont à 65€.

Quelle est la suite pour toi ?

Je prévois de diversifier un peu les modèles, de nouvelles formes, de nouvelles déco. J’aimerais que les produits soient un peu plus distribués, plus de collaborations que ce soit des artistes ou des marques, des magasins, skates shops locaux ou de grandes enseignes, faire des parutions dans des magazines. 
J’avais aussi eu un projet de fabriquer des snowboards primitifs et épurés, ce sera pour l’hiver prochain. J’ai essayé de mélanger un peu les techniques, comme celle du surf. J'ai pris du bois contreplaqué classique avec de la résine et de la fibre de verre pour avoir ce côté un peu surf au toucher, et je l'ai isolé de la neige pour que le bois ne gonfle pas.

Qu’est-ce que tes boards apportent de plus aux consommateurs ?

Je n’ai rien inventé, je n’apporte pas de technologie particulière. Je ne vais pas dire que mes boards sont mieux que les autres, elles sont différentes. Je pense que c’est une histoire de conscience, il s'agit juste de consommer différemment, savoir d’où ça vient, apporter quelque chose à une personne et participer au développement d’un artisan local, consommer de façon logique. J’aimerais bien que les gens disent "je skate avec une board fabriquée par telle personne", et mettent un visage sur cette personne. Qu'ils pensent différemment. Ça a peu été fait dans ce milieu et ce serait bien que les gens se rendent compte que l’on peut consommer différemment aussi dans le skate. 



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